Empathie, confraternité, compassion …
Les mots manquent pour qualifier la tristesse ressentie
par nombre d’ex-salariés et cadres du réseau des radios locales de Radio France,
et sans doute aussi
par la majorité des équipes de terrains qui font ce qu’elles peuvent,
toujours,
pour continuer à servir leurs publics en proximité.
4,2 % en audience cumulée …
Voilà le résultat sur les 3 premiers mois de cette année,
soit quelques 2 millions 400 000 auditeurs.
C’est presque 2 fois moins qu’en 2013
quand France Bleu à 8% rassemblait quotidiennement
4 millions 238 000 fidèles.
La terrible spirale infernale de la chute d’audience est due en partie évidemment,
comme pour toutes les stations,
au désamour pour les offres de flux.
38,46 millions restent tout de même fidèles à la radio,
mais 264 000 auditeurs perdus
en un an !
Le public préfère de plus en plus consommer de l’audio à sa convenance,
via les podcasts.
Force est de constater tout de même que certains postes continuent à performer,
certains ironiseront sur le mode "Papy fait de la résistance".
Nombre de stations savent toujours honorer leurs promesses,
cultiver leur raison d’être.
Elles respectent leur ADN,
et demeurent identifiables :
Inter, Info, RTL, NRJ, Nostalgie, Musique, Radio Classique, Culture, Skyrock, FIP, RMC.
Quitte à faire évoluer sa promesse
comme pour Europe1 qui a mué,
revendique son positionnement éditorial,
et reconquiert un public.
L’ADN des radios locales de Radio France depuis leur création en 1980
est de servir les publics en proximité …
Voilà, pour nombre d’observateurs
et d’artisans de son succès il y a quelques années,
où le bât blesse…
Non pas seulement du fait de l’investissement des équipes sur les 44 terrains,
même si pour certaines oreilles les programmes diffusés sonnent dans la forme désormais
quelque peu datés...
Mais surtout du fait de choix stratégiques opérés par les directions centrales depuis des années,
et donc validées par les Présidences successives à la tête de Radio France.
Ce réseau qui emploie quelques 1400 collaborateurs coûte cher.
Il a manifestement été géré comme une variable d’ajustement budgétaire,
pour l'ensemble du groupe,
en réduisant comme peau de chagrin la part de production spécifique
de chaque implantation.
Au moment des gilets jaunes,
alors que la marque proclamait "On est bien ensemble" :
pas d’antenne le samedi,
alors que tous les ronds-points de l’hexagone étaient occupés.
A la même époque, suppression des lignes ouvertes
alors que le pays ne souhaitait que dialoguer !
Au moment du confinement,
plus d’antennes locales
sous prétexte de protéger les personnels,
alors que plus que jamais le public avait besoin d’infos de proximité …
Se succèdent à la tête du réseau des responsables venus parfois du privé,
cherchant à calquer le modèle de réseaux commerciaux musicaux,
ou de cadres de RF reconnus,
plus ou moins,
pour leurs faits d’armes dans les organigrammes de stations nationales.
Les cadres de la grande époque férus,
eux, de proximité qui est un savoir-faire singulier,
sont invités ou contraints à quitter le navire.
Du coup,
il prend les allures du Titanic...
La marque France Bleu créée en 2000 serait-elle essoufflée ?
Que la proximité n’est plus "tendance" en ces temps de globalisation effrénée
alors qu’un premier ministre à l’époque n’a pourtant en bouche que la notion de "territoire" …
Le politique surtout observe depuis Bercy les dégâts budgétaires
et planifie la rationalisation de l’action régionale des radios et télévisions publiques…
Ainsi nait le 6 janvier dernier la marque ICI.
Ok mais pour quoi faire ?
Avec quel ADN …
Quand il y a quelques jours les cadres des régions s’entendent dire au studio 104
de la maison de la radio et de la musique
que même leur programmation musicale diffusée sur leurs 44 stations
sera prochainement pilotée depuis Paris,
quand des parts entières de programmes supplémentaires seront produites par l’échelon central,
quand l’actualité à la demi de chaque heure en matinale est maintenant pilotée uniformément depuis Paris :
où ces stations sont-elles encore en mesure d’honorer leur promesse de "Vu d’ici" ?
ICI …
Voilà un autre challenge,
celui du rapprochement avec la télévision,
exigé par la tutelle,
même si la loi de réforme tarde à être examinée à l’assemblée.
Quid de cette "évolution",
pour ne pas dire de cette "révolution" qui piétine
malgré les initiatives ça et là de cadres locaux.
A la dernière grand-messe réunissant les centaines de cadres venus de leurs régions,
avenue du Président Kennedy,
cet enjeu s’est résumé à un silence radio !
Quelle tristesse …
Ce réseau de radios locales,
quasiment unique au monde,
et qui colle si bien aux spécificités de notre pays,
est donc désormais positionné à 4,2 % d’audience,
avec pourtant, tant de talents et de savoir-faire sur les terrains …
Une idée,
basique pour tenter encore de sauver l’essentiel :
renouer avec l’ADN de la proximité
en oeuvrant avec les pros de la TV
en se donnant les moyens,
puisque c’est ce que souhaite l’actionnaire
d’inventer la nouvelle race de global média de proximité
affective évidemment,
mais géographique de surcroit !
Et accepter le fait que désormais,
le web est décidément au centre.
Ce média,
ce réseau de radioS
est un joyau.
Qui peut encore plus étinceler en cross media dédié à la proximité.
A ne pas brader !
Merci aux milliers de réactions reçues d'ores et déjà,
quelques heures seulement après la diffusion de ce papier ...
Pouvoir écrire,
en toute indépendance
et sans conflit d'intérêt,
ce que tant d'acteurs pensent tout bas,
et qui s'imposent
un silence radio ...
Thierry Mathieu
e-crossmedia
le 14 avril 2025.
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