Quand la réalité a dépassé la fiction ... Le cas d'école pour les chaines TV de la soirée du 13 novembre 2015.

 

Editions spéciales sur toutes les télévisions,

comme en radio ou en presse écrite …

Les attentas commémorés cette semaine

mobilisent toujours l’attention et l’émotion du grand public 

comme celle des pros de l’info !

 

 

8 attentats

en 33 minutes ...

Ce soir-là,

la réalité a dépassé la fiction !  

10 ans après

c'est aussi la série en 8 épisodes

"Des vivants",

qui devient patrimoniale,

Sur les deux premiers épisodes,

1,74 million de téléspectateurs,

soit 10,5 % de part d'audience pour France 2.

Mais sur la plateforme

france.tv

les scores sont encore bien plus impressionnants !

 

 

Les 8 épisodes ici : 

https://www.france.tv/france-2/des-vivants/

 

Le soir du 13 novembre

il y a 10 ans,

1 téléspectateur français sur 4

regarde sur TF1

le match France-Allemagne,

jusqu'à ce que le public présent au Stade-de-France,

dont le chef de l'Etat François Hollande,

entend trois explosions.

La chaîne qui devait dans la foulée diffuser la finale

de Secret Story

bascule en édition spéciale à 22h50.

Elle sera regardée en moyenne

jusqu'à 2h du matin

par 3,65 millions de personnes,

soit près d'un téléspectateur

sur 3.

France 2 interrompt, elle, ses programmes juste avant minuit

pour retransmettre l’allocution du Président de la République.

1,122 million de personnes suivent cette édition spéciale.

Celle du Soir 3,

diffusée plus tôt sur France 3,

avait déjà été suivie par 1,24 million de téléspectateurs.

 

Sorry its not set :(

 

Les universitaires

Amélie Aubert de Paris VIII,

Patrick Charaudeau de Paris Cité,

et Dominique Mehl du CNRS

ont travaillé sur cette nuit

qui reste unique dans l’histoire des médias

pour un évènement ayant lieu en France.

"Contrairement au 11 septembre 2001 à New York

où les TV sont déjà en édition spéciale

avant même que le deuxième avion se fracasse dans la seconde tour

du World Trade Center,

les attentats du 13 novembre se produisent hors de vue des caméras.

Bien que des journalistes de chaînes d’information en continu soient présents assez rapidement sur les lieux

dans les 30 minutes suivant les fusillades aux terrasses de café,

les périmètres de sécurité ont déjà été établis,

les faits ont eu lieu,

il faut donc reconstituer

ce qui s’est produit

et non commenter

ce que l’on voit ".

 

Sorry its not set :(

 

Les 3 chercheurs ont analysé finement l’antenne de BFM :

les 18 premières heures de l’édition spéciale  

à partir de 21 h 50 le 13,

jusqu’à 16 heures le lendemain.

"Confrontés à un chaos informationnel sur le terrain

et à une absence d’images,

on ne peut que constater que les images des lieux qui se superposent aux discours sont en contradiction :

les lieux apparaissant à l’image ne sont pas nécessairement ceux dont on parle.

Le téléspectateur en quête d’informations qui allume pour quelques minutes seulement cette chaîne

est pris par un récit incomplet et partiel,

et par une mise en perspective impossible".

 

 

"Par ailleurs,

les journalistes et présentateurs et présentatrices en plateau

apportent,

peu à peu, des précisions et corrigent la chronologie des événements.

Des journalistes spécialisés viennent commenter les images de voitures de police et d’ambulances 

en apportant des informations que les reporters ignorent.

Palliant les béances du récit,

les reporters de terrain viennent apporter des éléments de contexte ".

 

Les rédactions,

comme les forces de l’ordre sur place

vivent une forme de chaos, 

comme le montre ce documentaire diffusé ces jours-ci par LCI :

 

 

Les images d’amateurs qui sont diffusées à partir de la fin de soirée

n'ont pas la même qualité que des plans tournés par des cameramen professionnels :

les images tremblent ou les zooms sont grossiers.

Mais ces vidéos permettent d'offrir un récit continu des événements

et offrent un témoignage direct des attentats.

Elles montrent aussi les victimes

aux terrasses des bars

"Le Carillon"

et "La Belle Equipe"

immédiatement après les fusillades.

Enregistrés par la caméra embarquée d’un chauffeur de VTC,

les tirs des agresseurs sont terrifiants.

Les détonations à l'intérieur de la salle de spectacle au moment de l'assaut du RAID contre les djihadistes

sont parfaitement audibles sur une vidéo

prise depuis un appartement du boulevard Voltaire qui donne

sur la salle de spectacle.

 

Sorry its not set :(

 

Sarah Campos,

chercheuse en sciences de l’information,

a également écrit une thèse sur le traitement de ces attentats.

Selon elle les chaînes ont su ne pas sombrer dans une mise en scène excessive.

"Les acteurs de l’acte informationnel s’appuient sur la "monstration" de la preuve informationnelle

pour crédibiliser l’information et s’organisent autour de rôles prédéfinis,

contraire à l’aspect extraordinaire attaché à ces attentats.

L’emploi du conditionnel informe subtilement le téléspectateur

que les informations communiquées ne sont pas certifiées par la chaîne,

et ces informations sont systématiquement rattachées à leur source.".

 

Diffusé ces jours-ci,

ce documentaire de France 2 résume l’ensemble de la soirée …

 

 

Pour la chercheuse Sarah Campos …

"En se détachant des informations communiquées,

les médias prennent aussi certaines précautions concernant la qualification des faits,

en s’affranchissant également de tout discours analytique.

Les discours restent très descriptifs,

et l’ancrage de la qualification des événements en "attentat terroriste"

se fait principalement par voix officielle.

Néanmoins les médias,

comme tout autre interlocuteur,

ne peuvent être à l’origine d’un discours objectif.

Les interprétations,

sans être explicites se décèlent dans l’analyse discursive,

par l’emploi de stéréotypes populaires".

 

Sorry its not set :(

 

2 ans après les attentats de novembre 2015,

l’UNESCO a édicté un manuel intitulé

"Les médias face au terrorisme ".

Frank La Rue, Sous-Directeur général pour la Communication et l’Information

souligne que le véritable objectif des terroristes

est de "diviser la société en deux

et de dresser les citoyens les uns contre les autres en provoquant la répression,

la discrimination

et la discorde …"

 

 

A partir de nombreux exemples récents,

le manuel de l'UNESCO aborde aussi

la manière dont les journalistes traitent des victimes du terrorisme,

abordent les rumeurs,

rendent compte des enquêtes menées par les autorités,

conduisent des interviews avec des terroristes

et couvrent leurs procès.

Un chapitre distinct est consacré à leur sécurité,

notamment à la question des enlèvements et des traumatismes

qu'ils peuvent subir.

Consultable ici :

https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000247075

 

Thierry Mathieu

e-crossmedia

le 10 novembre 2025.

 

 

 

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