Un ministère de la "propagande" serait sur le point d’être institué en Russie, comme au temps de l'Allemagne nazie … Ou comment Vladimir Poutine assume l’idée de verrouiller l’info ! Témoignages de 2 anciens envoyés spéciaux en Allemagne qui l’ont rencontré : Lise Jolly et Michel Meyer.

 

Lise Jolly et Michel Meyer ont durant des années couvert l’actualité pour la radio et la télévision depuis Bonn et Berlin.

Ils ont rencontré Vladimir Poutine à l’occasion de reportages postérieurs à l’effondrement de l’URSS :

Michel Meyer à Saint Pétersbourg -ex Léningrad- alors que Poutine travaillait pour le maire après la chute du mur,

et Lise Jolly lors de l’inauguration du gazoduc Nord Stream 1.

 

Sorry its not set :(

 

Quelle est leur réflexion à propos de la création, envisagée par un député russe, d’un ministère de la propagande à Moscou ?

Ce serait revendiquer l’idée de propager, par tous les moyens disponibles, l’idéologie et la doctrine du Kremlin pour stimuler l'adoption du public, l’endoctriner.

Cette technique, initiée par un pape au moyen âge, a sinistrement été mise en œuvre par le régime nazi sous l’égide d’Adolph Hitler, par Goebbels.

 

Sorry its not set :(

 

Lise Jolly :

"Ce type vit comme en 1930 !

Nous assistons au même scénario qu’ont connu les Allemands à l’époque, avec la même fracture générationnelle : son délire trouve une audience chez les plus âgés évidemment.

Mais même si les jeunes russes en majorité sont convaincus par les propos délirants proférés par leur leader, ils ne souhaitent pas pour autant aller se battre.

Alors Poutine fait flèches de tous bois puisque son armée ne suit pas.

Il est dans le fantasme, et active les mêmes leviers que tous les dictateurs utilisent depuis Mussolini ."

 

Sorry its not set :(

 

Michel Meyer :

"Cela s’explique parce que ce type, pur produit de l’URSS, est un enfant de l’immédiate après-guerre.

Il naît à Léningrad, de parents déjà âgés, qui avaient connu le terrible blocus de la ville par les troupes allemandes et finlandaises.

Tout petit, il a vécu dans les souvenirs de la guerre, y compris dans l’évocation des cas de cannibalisme de la part de gens qui n’avaient plus rien à manger en ville…

 

Sorry its not set :(

 

C’est ce qui explique ce que j’appelle sa "sombritude" absolue…

Ma formule, c’est que ce type "s’est baigné dans une lumière noire".

Il est assombri, pour sa petite éternité à lui, comme le révèlent sa posture de mutisme et de silence morbide.

C’est ce qui le caractérise …"

 

Lise Jolly :  

"Pour Poutine, "l’empire russe" doit avoir la même ambition qu’ont eu, dans l’histoire, l’empire romain ou l’empire ottoman.

Lui, il veut sauver l’occident !

Aujourd’hui pour parvenir à cela, il n’a plus de complexe.

De toutes façons, son "nez rouge" depuis quelques années, était devenu trop visible.

Même si son armée ne tient pas la route, il tente d’imposer au monde entier une posture de "force et de puissance", dans la lignée de ses prédécesseurs, qui ont tenté l’aventure de l’empire communiste.

Il prend le relai, après les courts épisodes de libération sous Gorbachev et Eltsine et rétablit le dogme de l’état puissant.

L’homme russe est un homme fort !

Pour cela, il s’adapte comme il peut à l’époque et déploie des armes de communication, comme avec ce projet de mise en place revendiquée d'un ministère "de la propagande".

S’il est facile, comme dans les années 30 de contrôler la presse, la radio et la télévision qui existait déjà à Berlin sous le IIIème Reich,

il lui faut aujourd’hui investir les réseaux sociaux !

Pour cela des bataillons de "trolls" passent leurs journées à publier des articles et à réagir aux publications en écrivant des commentaires :

ils participent à la propagande et noyautent internet. "

 

Sorry its not set :(

 

Michel Meyer :

"Lui-même, intrinsèquement blessé par sa propre "sombritude" depuis sa jeunesse,  invente n’importe quoi.

Il joue l’acteur universaliste comme il peut, d’où la mise en place envisagée du ministère de la propagande …

C’est grotesque : y compris pour les membres du FSB (ancien KGB), il n’y a pas d’adhésion…

Les militaires, les gens sérieux, ne sont plus prêts à soutenir un type comme cela, même si selon les enquêtes d’opinion, quelque 60 % de la population est malgré tout prête à le suivre.

Dans son entourage, certaines personnalités veillent au grain, mais  ils sont tous paumés, et sa propagande n’y pourra rien !

Le contre-espion est à contre-emploi : ça ne peut plus durer."

 

Sorry its not set :(

 

Lise Jolly :

"Ce type reste un agent des services secrets, un contre-espion.

Jamais, qui que ce soit de sensé, ne pourra le croire …

L’histoire qui s’écrit quotidiennement sous nos yeux et entre nos oreilles ne surprend en rien les connaisseurs de la Russie.

Le romancier Giuliano Da Empoli dans "Le mage du Kremlin", publié chez Gallimard, raconte d’ailleurs de manière très documentée ce à quoi nous assistons.

C’est une lecture très actuelle, à recommander, même s’il n’a pas décroché le Goncourt jeudi dernier !"

 

 

e-crossmedia, le 4 novembre 2022.

 

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