Comme au Fast Food : les Fast News ! Ne pas tomber dans "l’infobésité",  se nourrir d'actu de qualité : la 34e semaine de la presse et des médias à l'École implique les entreprises professionnelles de l’info.  Entretien avec Michel Dumoret, directeur à France Télévisions, en charge de la lutte contre la désinformation, de l’éducation aux médias et de la jeunesse.

Plus de la moitié des Français parlent de "fatigue informationnelle", surtout les jeunes qui sont plus connectés aux réseaux sociaux qu’aux médias traditionnels.

Plus de neuf d’entre eux sur dix en sont, en effet, accros.

Les sources se démultiplient : les Français utilisent en moyenne chaque jour 8,3 canaux différents pour s'informer,

avec sans surprise une surreprésentation des réseaux sociaux, plusieurs fois par jour.

Dans ce cadre le régulateur, l’ARCOM, entend avec les acteurs professionnels de l’info lutter contre les fakenews et pour la promotion de la citoyenneté numérique.

Coup de fil à Michel Dumoret,

directeur en charge à France Télévisions, de la lutte contre la désinformation, de l’éducation aux médias et de la jeunesse.

"Retrouver le goût de s’informer, comme retrouver le goût de bien s’alimenter …

Il y a quelques analogies entre les métiers de bouche et les métiers de l’info :

nous arrivons à une indigestion notamment chez les jeunes issus des milieux les moins favorisés.

Ils vivent une surabondance de consommation d’info, par les pushs, les réseaux sociaux.

C’est en direction de ce public qu’il faut cibler notre mission, parce qu’ils finissent par subir de réelles indigestions."

Comme quand il est question de "malbouffe", tout devient trop gras ?

"Exactement !

Donc il faut se doter d’outils, comme dans le domaine de la gastronomie.

A France Télévisions, nous appelons ça les capteurs.

Ce sont des gouteurs qui vérifient les sources, les ingrédients qui composent une information,

qui évaluent comment l’article ou la vidéo ont été cuisinés …

Pour filer la métaphore culinaire :

comment le sujet a-t-il été monté en mayonnaise ?

Comment les journalistes ont-ils choisi leurs sources, comment a été mijoté le sujet :

il faut savoir exposer la qualité et l’exigence de la recette, pour rendre l’info plus digeste."

Comme ici en Occitanie ...

France 3 accueille des jeunes gens à Toulouse.

Mais, pour poursuivre le parallèle avec l’alimentation,

comment indiquer aux jeunes consommateurs, et aux plus âgés, quelles sont les adresses fréquentables,

comment les amener à fréquenter les bonnes tables, celles qui sont dignes de ce nom ?  

"C’est à nous de savoir aller physiquement à la rencontre de ces jeunes, là où ils sont, et à nouer toujours plus de partenariats avec les écoles, les collèges, les lycées.

Il faut leur faire visiter nos cuisines, nos salles de rédaction, de montage, nos plateaux.

Il faut leur expliquer nos recettes, comment se choisit, puis est traité un sujet.

C’est l’ambition de cette semaine !

Il faut éduquer le jeune public, qu’il ait les clés du choix de ses sources d’info, comme ce qu’il choisit de manger.

Ce n’est pas parce que telle ou telle publication fait un million de vues sur leurs réseaux sociaux qu’elle est digne d’intérêt,

c'est comme au restaurant …

Il y a des enseignes de restos "tendance" qui ne garantissent pas pour autant une qualité de nourriture saine et digeste."

Le resto incontournable, en matière d’info, c’est par exemple TikTok …

"Oui ...

France Télévisions va où les jeunes sont sur les réseaux sociaux, comme sur TikTok en effet et Brut évidemment.

On peut dire qu’on a diversifié nos menus.

Ils ne sont pas du tout les mêmes que ceux que l’on peut proposer dans les "19-20" ou au 20 heures en linéaire.

Pour le public jeune c’est beaucoup plus allégé, c’est une écriture particulière, comme on parle de nouvelle cuisine."

La pédégère de France Télévisions Delphine Ernotte-Cunci dit que dorénavant l’offre numérique est un objectif essentiel à travailler,

en parallèle avec les chaines de télé traditionnelles …

"Elle le dit,

comme le Boss de la BBC, cela s’impose également aux Etats Unis.

Demain, d’içi une dizaine d’années, la première offre sera probablement numérique, et les chaines de flux prendront un sacré coup de vieux !

Cela veut dire que nos équipes, tant au siège à Paris -Esplanade Henri de France, que dans les 24 stations de France 3 en métropole ou les 9 implantations des 1ères outremer,

se doivent dès maintenant de penser à ces nouvelles donnes, pour un avenir très proche.

Il est hors de question de substituer l’un pour l’autre, mais il est question de produire les deux.

Il demeure aujourd’hui un énorme potentiel de téléspectateurs qui regardent l’info proposée par toutes les offres de France Télévisions .

Mais l’idée c’est de continuer à s'adapter et à s'ouvrir sur ce monde en mutation complète …

Je suis moi-même sur un projet d’émission dédiée à la jeunesse. Je la pense d’abord "numérique" !

Nous souhaitons nous adresser aux jeunes, donc nous allons là où ils sont.

L’idée est donc, pour toutes les équipes, de les accompagner en termes de formation pour actualiser leurs savoir-faire,  

qu’ils s’approprient les nouveaux codes d’écriture et de format".

Thierry Mathieu,

Président d'e-crossmedia,

le 29 Mars 2023.