Sorry its not set :(

Les jeunes gens ...

Rêvent-ils encore de devenir journalistes ?

Une centaine d'entretiens seront à lire mi septembre .

Plus que désenchantée,

la génération "digitale native"

a du mal à épouser l'info,

comme les entreprises de presse la pratiquent.

Entretien avec Jean-Marie Charon.

Sorry its not set :(

 

Il y a quelques 35000 confrères détenteurs de la carte de presse en France,

l'âge moyen se situe à 47 ans.

 

"Génération désenchantée" chantait Mylène Farmer il y a 30 ans …  

Les jeunes attachés à l’info seraient aujourd’hui plutôt désabusés par les entreprises qui produisent de l’actu :

devenir journaliste, telle qu’est maintenant pratiquée la profession, ne les ferait plus rêver.

C’est l’un des enseignements d’une centaine d’entretiens compilés par un sociologue spécialiste des médias dans son livre à paraitre mi-septembre,

et qui fera grand bruit sur les ondes !

 

Il est l'un des piliers des Assises du Journalisme, ingénieur d'études au CNRS,

a été conseiller des ministres de la culture Catherine Trautman et Fleur Pellerin.

Il intervient régulièrement sur France Culture...

Coup de fil à Jean-Marie Charon.

"C'est vers la 3eme, ou disons au début des années "lycée", que naissent souvent les vocations.

Pour certains celà  peut même représenter un  2e choix,

après avoir pensé à une autre profession ...

Quelques-uns renoncent à la recherche par exemple, et se disent pourquoi pas le journalisme ?

En tous cas, ce qui m'a beaucoup frappé en parlant avec tous ces jeunes,

c’est l’ambition d’être utile, d’être au service des gens.

Et c’est une évolution pour notre pays !

 

Dans les années 90, une universitaire américaine avait fait une étude  internationale sur ce sujet,

en comparant les idées des jeunes à propos du journalisme.

En France, les motivations résidaient alors dans le besoin de s'exprimer ou de jouer un rôle dans le débat public.

Aujourd’hui cela apparait plus modeste, plus humble ..."

 

Et aussi, paradoxalement plus noble !

"Oui...

C’est être au service des gens,

être utile,

mais également exercer le métier de façon indépendante, autonome.

Et c’est là, nous y reviendrons, que se logent sans doute l’insatisfaction,

les doutes,

quand il s’agit de trouver sa place dans le monde réel du travail."

 

Sorry its not set :(

 

C’est une génération nativement numérique qui se dit que chacun,

avec son smartphone, peut se prétendre journaliste

en publiant sur les réseaux sociaux ?

"Oui mais en réalité, beaucoup savent assez bien faire la part des choses entre ce qu'est l'information,

et ce qui n'est que du registre de la simple expression.

 

La question des fameux influenceurs sur les réseaux sociaux, et donc omniprésents pour le jeune public, est très importante à observer.

Leurs publications ne sont pas assimilées à du journalisme.

Les jeunes gens qui s’intéressent à l’actualité ambitionnent d’être sur le terrain, de produire des enquêtes longues,

d’avoir des process lents, voire même complexes !"

 

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Les motivations des jeunes gens ont énormément évolué !

"En effet...

En 90 et durant une dizaine d’années lorsque j’étais prof au CFJ, c’est l’actu chaude qui passionnait les étudiants.

Mais avec la banalisation de l’instantanéité offerte par la technologie,

depuis les années 2000, cela n’a plus d’intérêt.

 

Aujourd’hui ils souhaitent au contraire retrouver le travail d’enquête, d’expertise,

tout en sachant que c’est une pratique rare, que peu de médias offrent ces possibilités.

 

D'ailleurs, ils ont conscience de la précarité.

Beaucoup se disent qu’ils n’exerceront sans doute pas cette profession durant toute leur vie.

Souvent ils écrivent déjà sur le web,

ils sont auteurs de blogs depuis l’adolescence,

ils ont l’habitude de publier quotidiennement leurs points de vue.

Pour eux c’est une pratique banale qui concerne tout le monde,

et non plus seulement les plutôt "favorisés" qui, jusqu’alors, s’autorisaient l’ambition d’accéder à cette profession.

 

Sorry its not set :(

 

Et puis ils ont conscience qu'ils vont rentrer dans un métier assez décrié,

pour lequel il y a de la défiance …

Un certain nombre d'entre eux se sont déjà exprimés sur leurs réseaux à propos des gilets jaunes,

ils ont participé, ou été témoins parfois des manifs, à propos par exemple de la réforme des retraites.

Certains se sont fait taper dessus, se sont fait bousculer soit par la police ou par les manifestants,

et donc ils sont assez conscients du contexte qui n’est pas si génial que ça !

IIs ne sont pas du tout dans l'idéalisme ...

Déjà ma précédente enquête consacrée aux journalistes qui décident de quitter la profession, aboutissait sur un constat de désenchantement :

40% des détenteurs de carte de presse quittent le métier au bout de seulement 7 ans, et c’est donc un phénomène très important chez les jeunes.

Et puis ils sont confrontés au contexte économique.

Aujourd’hui les carrières se construisent assez peu dans la durée,

et les ambitions personnelles ne sont que trop rarement satisfaites.

 

En réaction sans doute au poids des réseaux sociaux sur lesquels chacun s’autorise à publier tout et n’importe quoi,

les jeunes gens intéressés par le métier de journaliste souhaitent l’exercer de manière noble.  

Pas un seul, sur la centaine d’entretiens réalisés, ne m’a parlé de "scoop",

et pourtant cela a fait rêver des générations entières de reporters !

 

Leur figure idéale, c’est par exemple Florence Aubenas,

c’est "prendre son temps".

Leurs modèles sont des journalistes qui pratiquent véritablement le terrain,

comme les grand-reporters,

surtout pas les chroniqueurs ou les éditorialistes qui défilent sur les plateaux de télévision ou au micro des radios …

Pour résumer,

il s’agit de ceux qui prennent le temps d’écouter, réellement, les gens !"

 

"Jeunes journalistes, l’heure du doute",

la nouvelle enquête de Jean-Marie Charon à paraitre mi-septembre aux éditions "entremises".

 

 

Thierry Mathieu,

Président d’e-crossmedia,

le 18 août 2023.

 

 

 

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