PROXIMITE ... la radio plus que tout autre média sait faire : riche étude d'HEC Montréal pour la Rai. Entretien depuis la Province du Québec avec Sylvain Lafrance .

Déclin de la radio ? La préoccupation est mondiale ….

La RAI, le service public audiovisuel italien, publie une grande étude, avec le Pôle Médias HEC Montréal.

Composante désormais de ce qu’il est convenu d’appeler "l’audio" avec le podcast ou les plateformes de téléchargement,

la "vieille dame" n’en a pas pour autant dit son dernier mot :

la voix en direct assure une réelle proximité.

C’est sa valeur ajoutée, irremplaçable …

Coup de fil à Montréal au directeur du pôle média d’HEC, ex dirigeant de Radio Canada :

Sylvain Lafrance :

"Ce bon vieux média, la radio, est capable de répondre aux attentes auxquelles les nouvelles technologies ne peuvent pas faire face…  

Elles n’ont pas développé tout à fait la chaleur de la radio, la simplicité de la radio, l'accompagnement permanent de la radio :

elle demeure, elle, la radio, le vrai média essentiel de proximité.

Cette présence là et ce côté extrêmement rassembleur de la radio au-delà des âges, au-delà des cultures, est pour l’instant irremplaçable …"

Vous le vivez concrètement depuis des semaines au Canada qui est ravagé par des incendies monstres d’ouest en est du territoire.

Le web, les réseaux sociaux, la télévision, tous les médias en parlent …  

Mais la radio continue à jouer un rôle particulier ?

"Cet exemple-là est bon parce que ces incendies provoquent d'énormes nuages qui se déplacent dans différentes régions.

Ce "smog" est sur Montréal ce lundi matin, et il le restera jusqu’à midi.

Les autorités demandent aux gens de rester à la maison.

Ce n’est pas une injonction, mais on leur conseille fortement de rester chez eux.

La radio, à la différence des autres médias, permet d’être précise de localité en localité, et de communiquer de précieuses infos en temps réel,.

C’est ce que ne savent pas faire les autres supports avec humanité.

La télévision joue son rôle, mais elle le fait au niveau de l'ensemble de la Province Québec, 

et ce territoire est immense…"

"Aujour'dhui la radio précise par exmeple que le feu n’est plus qu’à 14 km de la ville de Chibougamau au nord de la Province,

il y a d’ailleurs beaucoup de pompiers français qui y sont pour combattre les brasiers...

Il faut accompagner en proximité des gens qui sont seuls chez eux et qui se disent :

"Mon Dieu, on nous recommande de rester à la maison, c'est bien ...

Mais qu'est-ce qu'il se passe vraiment ?"

La radio se montre rassurante, chaleureuse.

Elle seule peut soutenir les gens à chaque instant à l'occasion d'un tel événement, si anxiogène …

C’est sa très grande force :

grace à la voix, la radio est humaine."

Les séniors en restent convaincus, puisqu’ils restent fidèles à la bonne vieille radio,

mais qu’en est-il des jeunes gens ?

"Les 15 / 24 ans sont toujours très présents dessus, mais différemment.

Chacun peut regarder la télévision sur un iPad, sur l'ordi, sur son téléphone, mais ça reste de la télévision.

La radio, ça inclut la même chose mais avec le lien social en plus.

Même si les jeunes ont délaissé les récepteurs radio, ils l'écoutent aujourd'hui avec les contenus des plateformes sur le mobile, sur iPad, sur ordinateur.

Le défi est culturel :

il faut avoir épouser leurs modes de fonctionnement, les servir dans le fond comme dans la forme,

en répondant à leurs attentes."

La proximité que permet la radio permet également d’être plus en phase avec le public dans la réalité de son quotidien que ne le font les autres médias,

qui sont plus globalisés ?

"Ici au Québec par exemple, l'enjeu est de fabriquer des contenus que les jeunes vont écouter en français.

Et ça, c'est un autre défi parce que les jeunes sont contaminés, influencés, par les conteneurs anglophones.

Alors il nous faut fabriquer des contenus qui sont aussi attirants pour eux.

Il faut comprendre, prendre en compte l'univers dans lequel on est, dans lequel ils sont,

mais la radio, dans sa nouvelle dimension diverse que l’on appelle l’audio, peut encore en être la reine."

"86% des Canadiens sont toujours aujourd'hui à l'écoute de la radio, donc c'est beaucoup.

la profession sait s’adapter, évoluer du concept de radio au sens traditionnel, aux nouvelles dimensions que recouvre l’audio, si les pros adaptent leurs contenus,

cette clientèle-là existera longtemps encore : dans 20, 30, 40 ans ...

La radio ne meurt pas, elle se transforme. Les moyens de production et de diffusion évoluent. Les contenus audio peuvent s’émanciper plus largement qu’auparavant. 
Cela dit, avec les nouveaux canaux de distribution à sa disposition, la radio saisit-elle toutes les opportunités de se 
mettre au diapason ?

L’heure est au leadership social et c’est l’essence même de la mission de la radio : faire entendre la voix de l’autre et sortir de sa propre chambre d’écho."

Pour coller aux usages, dit aussi clairement le rapport d’HEC Montréal produit pour la Rai,

la radio doit repenser ses choix éditoriaux et les modes de production et de diffusion de ses programmes.

L’enjeu est de challenger l’influence des contenus des plateformes : produire des formats plus courts, au rythme rapide et au ton décontracté,

sans omettre l’incontournable élément qui manque à la radio :

l’image et donc la vidéo.

Thierry Mathieu,

Président d’e-crossmedia,

le 26 juin 2023.